Le 14 septembre 2022, la CEDH a condamné la France pour sa politique de rapatriement des femmes qui avaient rejoint l’Etat Islamique en zone siro-irakienne et de leurs enfants. Comment a évolué le traitement judiciaire des « femmes du Califat » ?

Dernière mise à jour: 08/11/2023 14:05:08

Le 4 juillet 2023, la France a mené une opération au cours de laquelle vingt-cinq mineurs et dix mères, originaires des camps situés dans le nord-est du Kurdistan syrien, ont été rapatriés. Cette action s’inscrit dans une série d’opérations de rapatriement collectif. En effet, le 24 janvier 2023, trente-deux mineurs et quinze mères avaient déjà fait l’objet d’un rapatriement. De plus, au cours de l’année 2022, plusieurs autres rapatriements ont eu lieu : le 20 octobre, quatorze mères, une jeune majeure, et quarante mineurs ont été rapatriés, suivi du transfert d’une femme accompagnée de ses deux enfants le 3 octobre 2022, ainsi que seize femmes et trente-cinq enfants, rapatriés en juillet 2022.

 

La politique de rapatriement en France

 

Ces dernières vagues des retours ont été médiatisées en dessinant les contours d’une politique de rupture à la suite de la condamnation de la France prononcée par la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH). En effet, le 14 septembre 2022, la CEDH a condamné la France pour violation de la Convention Européenne de sauvegarde des Droits de l’Homme, qui garantit le droit pour un individu d’entrer sur le territoire de l’État dont il est le ressortissant (article 3 § 2 du Protocole n° 4).

 

Néanmoins, la Cour considère que la France ne peut pas être tenue pour responsable des conditions de vie dans les camps puisqu’elle n’y exerce pas sa juridiction. De plus, la CEDH n’a pas préconisé un changement fondamental dans la politique de rapatriement, qui demeure ancrée dans des décisions examinées au cas par cas. La condamnation de la France se résume principalement à l’absence de formalisation du processus décisionnel conduisant au refus de rapatriement. Plus spécifiquement, selon la Cour, les autorités françaises ont omis de fournir les garanties appropriées contre l’arbitraire lors de l’examen des demandes de retour formulées par les requérants pour leurs proches, et ces derniers n’ont pas reçu de justifications quant au refus de rapatrier les enfants. La Grande Chambre recommande donc une meilleure communication avec les requérants en expliquant les motifs découlant de considérations impérieuses d’intérêt public ou de difficultés d’ordre juridique, diplomatique et matériel que les autorités exécutives peuvent légitimement invoquer. Elle suggère également la mise en place d’un mécanisme de recours permettant de contester les décisions de refus de rapatriement, ainsi qu’un réexamen des demandes rejetées.

 

Ainsi, les derniers rapatriements ne peuvent pas être considérés comme une conséquence directe de la condamnation car entre mars 2019 et janvier 2020, la France avait déjà organisé cinq missions distinctes en Syrie dans le but de rapatrier trente-cinq enfants de la zone syro-irakienne. Ces retours sélectifs étaient fondés sur une évaluation au cas par cas, incluant les orphelins, les mineurs isolés, et les situations relevant de cas humanitaires. Par ailleurs, une analyse minutieuse de la politique institutionnelle révèle que la France, depuis 2013, a pris en charge environ 326 mineurs après un séjour dans une zone de groupements terroristes, notamment en Afghanistan, au Yémen, en Égypte, en Libye, ainsi que dans la région syro-irakienne.

 

Cette observation permet de discerner un continuum évolutif dans la politique de rapatriement depuis le mandat de François Hollande jusqu’à celui d’Emmanuel Macron. D’autre part, il convient de noter que la politique en la matière ne cessera pas d’évoluer car les autorités politiques se penchent actuellement sur les modalités de rapatriement de l’ensemble de leurs ressortissantes, y compris celles qui refusent un retour en France en raison de leur allégeance à l’État Islamique (Daesh). Au cœur des préoccupations institutionnelles figurent la complexité inhérente à la révocation de l’autorité parentale garantissant ainsi le retour exclusif des mineurs, ou l’imposition d’une obligation de rentrer en France aux mères plus réfractaires. L’évolution in itinere de la politique de rapatriement nécessite une constante adaptation des modalités de prise en charge institutionnelle, tant pour les adultes que pour les mineurs. Ainsi, les procédures pénales visant les mères entrées sur le territoire national de la zone irakienne, notamment dans les camps d’Al hol, Roj et Aïn-Issa du Kurdistan syrien, ou d’autres territoires contrôlés par des groupements terroristes, sont à appréhender conjointement à la prise en charge des leurs enfants et à l’évaluation de leur niveau d’endoctrinement idéologique.

 

Le dispositif de prise en charge des parents

 

Le refus de rentrer dans ce que certaines appellent « terre de mécréance » met en évidence le niveau d’endoctrinement atteint par certaines mujâhidât (combattantes). Toutefois, les femmes ayant rejoint Daesh ont longtemps bénéficié d’un biais de genre inversé. La justice française a fait preuve d’une certaine mansuétude à leur égard en les considérant des simples muhâjirât (migrantes), car elles n’avaient fait que suivre leur mari.

 

Le traitement judiciaire des femmes dans la thématique djihadiste a sensiblement évolué en 2015, après le projet terroriste d’un commando féminin totalement réceptive à l’idéologie mortifère de Daesh. Avant cette date, les femmes revenant de la zone syro-irakienne n’étaient presque jamais placées en garde à vue à leur retour, et très rarement incarcérées. Cependant, la place grandissante affectée aux femmes par les organisations terroristes a conduit à des nécessaires transformations dans la politique antiterroriste. Actuellement, les mères ayant séjourné dans la zone syro-irakienne – rentrées par voie aérienne, maritime ou terrestre, de manière officielle ou clandestine – sont systématiquement placées en détention provisoire, quelle que soit la modalité de retour : I) un retour par « rapatriement » consécutif aux opérations menées par les autorités françaises ; II) un retour lié à une mesure d’expulsion administrative encadrée par le « protocole Cazeneuve », un accord de coopération policière entre Ankara et Paris, entré en vigueur le 26 septembre 2014 ; III) un retour « clandestin » lié à la découverte a posteriori d’un séjour dans une zone d’opération de groupements terroristes.

 

Ainsi, les mujâhidât font l’objet de poursuites pour plusieurs chefs d’accusation, notamment l’association de malfaiteurs terroristes liée à leur départ vers les territoires de l’État Islamique, ainsi que la mise en danger de la santé et de la moralité de leurs enfants. De conséquence elles doivent verser une indemnisation à leurs enfants, considérés comme des parties civiles et victimes des décisions parentales. À titre d’exemple, le début de mars 2023 a été caractérisé par deux procès distincts à deux femmes ayant rejoint Daesh, rentrées en France avec une mesure d’expulsion administrative (protocole Cazeneuve). Une Cour d’Assises spécialement composée a condamné Doha Mounib à douze ans de réclusion et Amandine Le Coz à dix ans pour avoir rejoint les rangs de l’État islamique. Ces deux procès pour des revenantes ne sont pas les premiers : une quarantaine de djihadistes françaises ont déjà été condamnées, d’autres sont en attente de jugement, tandis que certaines ont été mis en examen. La situation de chacune des détenues fait l’objet d’un réexamen régulier au sein d’un quartier d’évaluation de la radicalisation (QER). La nature de l’imprégnation idéologique est évaluée par des équipes spécialement formées, notamment si un risque de passage à l’acte violent est identifié. À l’issue de cette évaluation, il y a trois options possibles : soit une détention ordinaire si le risque d’endoctrinement est faible, soit une orientation en quartier de prise en charge de la radicalisation (QPR), soit un placement en quartier d’isolement pour les personnes les plus dangereuses.

 

Les programmes scolaires sous Daesh

 

La dimension idéologique revêt une importance décisive, aussi bien dans le processus de prise en charge des adultes que, plus particulièrement, lors du rapatriement des enfants. Identifier les fondements idéologiques qui ont pu être inculqués aux mineurs –ayant été socialisés au sein de Daesh ou ayant côtoyé cette idéologie dans les camps – s’avère une tâche extrêmement complexe.

 

Le projet califal a nommé cette jeune génération comme « lionceaux du califat » (ashbâl al-khilâfa), « lionceaux de l’unicité » (ashbâl al-tawḥîd) et « bombes à retardement » (kanâbil mawqûta). Ces expressions, fréquemment employées dans les médias en négligeant entièrement la sémantique djihadiste dont ils sont porteurs, constituent des termes spécifiques de la propagande de Daesh. Il est essentiel de comprendre que ces expressions ne sont pas anodines et qu’elles ont un sens profondément lié à la rhétorique et aux objectifs du mouvement djihadiste. En les utilisant sans discernement, il existe un risque de contribuer involontairement à leur normalisation, ce qui peut entraîner des conséquences néfastes en perpétuant l’idéologie djihadiste.

 

Cependant, il est indéniable que dans tout système totalitaire, l’établissement d’un programme éducatif pour la jeunesse fait partie d’une stratégie avec pour objectif un basculement, visant à créer des enfants qui seraient alliés au système. Le système éducatif de l’État Islamique est singulièrement influent car il est conçu pour garantir l’affiliation et une loyauté aveugle à sa doctrine sur le long terme. En effet, Daesh a investi dans des programmes scolaires visant à former une génération uniforme, monolithique et homologué avec un codage idéologique prédéfini. Les méthodes mises en place conduisent à un sentiment d’appartenance exacerbé par l’endoctrinement, le recrutement, la formation et la violence.

 

Le projet califal prévoyait pour les jeunes âgés de 6 à 15 ans des programmes et des entrainements promus par le ministère de l’éducation de l’État Islamique (dîwân al-ta’lîm), dirigé à l’époque par un Allemand d’origine égyptienne. Le ministre se signait dans les circulaires avec le pseudonyme (kunya) significatif de "l’homme aux deux cornes" (dhû-al-qarnayn), en référence à un personnage coranique réputé pour sa capacité exceptionnelle à conquérir des territoires, à instaurer l’ordre et à châtier les mécréants Cette kunya symbolise efficacement les aspirations éducatives de Daesh et par conséquent, Dhû-al-qarnayn a opéré une transformation profonde des programmes scolaires : les opérations arithmétiques et l’anglais ont été enseigné aux élèves à travers l’utilisation des poignards et des kalachnikovs ; les manuels de géographie omettaient l’étude des frontières nationales, considérées une forme de paganisme politique qui permettent aux musulmans et aux non-musulmans de vivre au même endroit. Ainsi, la géographie se limitait à l’étude des frontières naturelles et ses caractéristiques géologiques. Dans les écoles de Raqqa ou de Mossoul, la totalité des matières profanes telles que l’art, la musique, les sciences humaines, l’histoire – notamment celle des religions – ont été éliminées au profit de l’étude d’une histoire découpée à leur gré. Par ailleurs, l’assassinat des enseignants, emblème de la laïcité honnie, avait déjà fait l’objet de communiqués du ministère de l’éducation bien avant l’assassinat de Samuel Patty.

 

Tout cela a conduit à l’établissement d’une idéologie clivante, créant une ligne de séparation nette entre ceux qui suivent cette doctrine et ceux qui sont considérés apostats et infidèles, entre illicite (harâm) et licite (halâl), entre terre de mécréance (kufr) et terre d’islam. Ces dichotomies étaient profondément ancrées dans le contenu pédagogique, structurant le réel en oppositions irréconciliables, avec l’appui du principe d’allégeance et désaveu (al-walâ’ wa-l-barâ’) et l’anathème (takfîr). En fonction du dégrée d’imprégnation de ces principes, les jeunes se voyaient confier diverses responsabilités. Certains étaient sélectionnés pour devenir des porte-parole chargés de diffuser la doctrine dans les vidéos de propagande, tandis que d’autres étaient déployés en tant que gardes-frontières pour leur capacité d’observation et d’analyse. En revanche, ceux qui se distinguaient par leur absence d’émotion étaient choisis pour participer aux opérations de flagellation et d’exaction, tandis que ceux qui ne montraient aucune aptitude particulière étaient recrutés pour des opérations suicides.

 

Le dispositif de prise en charge de mineurs de retour de zone

 

Malgré les préceptes idéologiques fondés sur la valeur du martyre et la vengeance de leurs pères décédés pour la cause djihadiste, les mineurs sont considérés victimes d’une exploitation à des fins criminelles et pour cela leur âge et leur degré d’implication sont prises en considération au regard des logiques d’enrôlement de Daesh. Le dispositif de prise en charge des mineurs de retour de zone est coordonné au niveau national par le Parquet National Antiterroriste (PNAT). Actuellement, chaque mineur rapatrié bénéficie d’une mesure individuelle, comprenant un placement auprès de l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE) et une mesure d’assistance éducative confiée à la Protection Judiciaire de la Jeunesse (PJJ) territorialement compétent, en fonction du lieu de résidence de la famille élargie ou du dernier domicile connu de la famille avant leur hijra militaire vers Daesh. Au niveau territorial, le processus de réintégration des enfants fait l’objet d’une prise en charge au sein des procédures administratives, notamment par le biais des cellules de prévention de la radicalisation et d’accompagnement des familles restreintes (CPRAF R), qui coordonnent les démarches judiciaires, éducatives et médicales afin d’apporter collectivement la meilleure prise en charge possible.

 

Les professionnels de terrain jouent un rôle fondamental, souvent en sourdine, dans le processus de prise en charge. Ils sont aux premières loges de l’intervention dans le cadre des mesures d’investigation et d’assistance éducative. Ils proposent à la juridiction compétente d’éléments de compréhension, d’analyse et d’observation relatifs à l’histoire familiale, au parcours antérieur du mineur, à ses parents et à son entourage. Il est essentiel de noter que la situation familiale de mineurs est souvent complexe à reconstruire car la plupart ne dispose pas d’une identité administrative officielle. L’établissement du lien de filiation s’avère alambiqué à établir en raison de la non-localisation des parents, de leur détention, voire de leur présomption de décès. De plus, les structures familiales peuvent revêtir des configurations composées, car la conception de ces mineurs a pu être le résultat de contraintes et de relations non consensuelles, telles que des viols, de l’esclavage sexuel ou la polygamie. Il semble également que certaines mères aient agi comme des mères adoptives en prenant en charge certains enfants à la suite du décès de leur mère biologique. Par ailleurs, lorsque les parents du mineur sont présumés décédés ou incarcérés, les professionnels évaluent la capacité de la famille élargie à jouer un rôle actif dans les décisions concernant l’avenir du mineur. Dans le cadre de leur évaluation, les professionnels exercent des responsabilités singulières car ils doivent tenir en compte des symptômes traumatiques potentiellement manifestés par ces mineurs. Ils évaluent l’ensemble de ces éléments lors de moments formels, tels que les visites à domicile, les visites en milieu carcéral, ainsi que dans le cadre des activités culturelles et artistiques proposées au mineur et à sa fratrie.

 

À partir de toutes ces informations, des décisions judiciaires sont prises dans le but de protéger l’intérêt supérieur de l’enfant. Ces décisions peuvent inclure différentes mesures, telles que la mise en place éventuelle d’une tutelle légale pour s’occuper de l’enfant ou la délégation partielle ou totale de l’autorité parentale à une autre personne ou entité, si cela est jugé nécessaire. En ce qui concerne la santé de l’enfant, un bilan complet est effectué, couvrant à la fois les aspects somatiques et médico-psychologiques. De plus, un suivi thérapeutique est mis en place pour garantir que l’enfant reçoit les soins appropriés pour ses besoins spécifiques. En ce qui concerne l’éducation, il est envisagé d’intégrer l’enfant dans le système scolaire en veillant à ce qu’il bénéficie d’un accompagnement approprié. Cependant, lors du processus d’inscription, le parcours du mineur est confié uniquement au directeur de l’établissement, et le mineur est encouragé à maintenir la confidentialité de son histoire. Cette approche préventive, bien qu’initialement justifiée, présente des limites évidentes, notamment lorsqu’il s’agit d’enfants âgés de 3 à 7 ans, qui s’expriment sans retenue, ainsi que des adolescents en plein processus de construction identitaire. Cela souligne la nécessité d’adopter une approche plus globale au sein de la société, en éduquant de manière adéquate les jeunes générations sur l’histoire du terrorisme et ses conséquences. Le Musée-mémorial du terrorisme, qui ouvrira ses portes en 2027, pourrait jouer un rôle éducatif en favorisant le dialogue sur la manière de faire face à ces problèmes au sein de la société.

 

Les défis de l’après-Daesh

 

Ainsi, les cheminements de l’après Daesh sont sinueux et des perspectives d’évolution à court et à long terme méritent d’être explorées au niveau européen. Évidemment, une analyse en profondeur qui couvre une période prolongée est indispensable à trois égards majeurs. Tout d’abord, elle permettrait d’évaluer l’impact durable des traumatismes subis par les individus sur le long terme. Deuxièmement, elle offrirait l’occasion de réfléchir sur l’achèvement de l’installation des mineurs de retour de zone dans les territoires de vie de la famille élargie ou du dernier domicile connu de la famille.

 

En effet, la chute du Califat n’a pas marqué la disparition de l’idéologie djihadiste. Ces lieux sont encore gangrenés par des écosystèmes djihadistes qui ont auparavant amené leurs parents à se désaffilier et retrouver un sens derrière la révolution théologique, politique et éducative proposé par l’État Islamique. En conséquence, réinsérer les jeunes rapatriés dans ces mêmes milieux pourrait les amener à se réfugier sous la coquille rigide de la doxa islamiste plutôt que d’explorer ses contradictions. De ce fait, un troisième défi majeur consiste à accompagner ces jeunes à se réintégrer dans la société tout en maintenant un équilibre entre leur identité religieuse et une compréhension critique des idéologies extrémistes.

 

Effectivement, leur retour les confronte à de nombreuses « vérités » contradictoires, ce qui rend nécessaire un processus progressif de transition identitaire qui ne vise pas un effacement ou la diabolisation de tout rituel religieux lié à l’islam. Ce processus de distinction entre foi (imân) et idéologie implique fortement l’individu et l’amène à prendre ses distances par rapport aux pratiques et aux normes de Daesh. Briser certains automatismes de l’identité djihadiste qui ont marqué une partie de leur vie peut être déstabilisant, d’autant plus que le retour en France représente déjà un changement environnemental majeur, avec ses propres défis et incertitudes. Il est crucial de reconnaître pleinement l’importance de cette transition identitaire, car elle joue un rôle fondamental dans la redéfinition des aspects statutaires, réflexifs et narratifs de l’identité au niveau sociétal. En outre, elle constitue un rempart essentiel contre la montée des identitarismes et d’autres formes de désaffiliation ou de migrations militaires (hijra) à l’avenir.

 

Dans ce contexte potentiel de transformation de la mouvance djihadiste, il est important de souligner que des approches exclusivement sécuritaires, qui négligent la dimension sociétale inhérente à ce phénomène, sont susceptibles de produire des résultats limités. La lutte contre l’idéologie djihadiste exige une approche holistique qui combine des mesures judiciaires, des initiatives sociétales et un engagement significatif dans le domaine de l’éducation. Seule une telle coordination d’efforts peut permettre de réduire la menace djihadiste et de contribuer à la formation d’une société dont les membres sont immunisés intellectuellement, politiquement et religieusement contre telles idéologies.

 

En conclusion, cette période charnière de l’après-Daesh délinéera la défaite intellectuelle du djihadisme ou son rebondissement. La réponse étatique, mise en place à travers divers dispositifs de prise en charge, représente un début de réponse démocratique visant à briser le cycle de la violence, même en dépit de l’émotion suscitée par les attentats. Ainsi, la possibilité de faire société autour de ces enjeux existe. Cependant, lorsqu’il s’agit de débattre des problèmes liés au terrorisme et à la radicalisation, il est souvent constaté que les positions divergentes tendent à se cristalliser autour d’un déni obstiné d’un côté et une hystérisation exagérée de l’autre. D’un côté, il y a le déni, où certaines personnes refusent de reconnaître l’existence du problème ou minimisent son importance. Cela peut découler d’une volonté de ne pas stigmatiser ou de ne pas faire preuve de préjugés envers une communauté particulière, mais cette omertà peut également entraver la prise de mesures nécessaires pour prévenir la radicalisation. D’un autre côté, il y a l’hystérisation, où l’accent est mis de manière excessive sur la menace terroriste, souvent en amalgamant l’islam, l’islamisme et le terrorisme.

 

 

 

© tous droits réservés
Les opinions exprimées dans cet article n’engagent que la responsabilité les auteurs et ne reflètent pas nécessairement la position de la Fondation Internationale Oasis