Dernière mise à jour: 22/04/2022 09:52:13

Auteur: Joseph Ratzinger Titre: Fede, verità e tolleranza. Il cristianesimo e le religioni del mondo Editeur: Edizioni Cantagalli, Siena 2003 Dans ce volume Joseph Ratzinger devenu pape depuis peu sous le nom de Benoît XVI affronte un des thèmes qui se trouvent au centre de la réflexion philosophique et théologique sur les religions en insistant sur le proprium de la foi chrétienne; non seulement celle-ci ne conduit pas à l'intolérance, mais elle constitue la voie pour éviter le risque de l'indifférence religieuse. L'auteur reconnaît la valeur des différentes voies qui conduisent à la rencontre avec Dieu, mais il n'en affirme pas pour autant qu'elles soient interchangeables et ce n'est surtout pas pour cela qu'il accepte l'hypothèse de l'impossibilité d'une effective révélation de la part de Dieu. En effet, ce qui caractérise éminemment la foi chrétienne est le fait de la révélation. En une extrême synthèse le futur Benoît XVI cerne dans ce volume quelques questions fondamentales. Il faut reconnaître en premier lieu que la question essentielle n'est pas celle qui concerne la voie la plus juste pour rejoindre le mystère de Dieu, mais de savoir quelle a été la voie que Dieu a choisie pour rencontrer l'homme. En second lieu il est nécessaire d'admettre vu que dans la pensée de l'auteur la question est d'une importance fondamentale que dans l'histoire des religions le Christianisme constitue, entre autre, la première tentative de concilier religion et raison, motif pour lequel l'indifférence religieuse (qui fait abstraction de l'instance de vérité) suppose une authentique régression. Enfin la conciliation entre religion et raison qu'offre le Christianisme fut accompagnée d'une proposition éthique adéquate et ce fait favorisa amplement la diffusion de la foi chrétienne. La comparaison entre la pensée de Ratzinger et celle de certains promoteurs du dialogue interreligieux à partir de présupposés que nous pouvons considérer relativistes se révèle instructive. Notre volume cite la critique qui a été faite à cette pensée, reprise dans un éditorial instructif de La Civiltà Cattolica (cahier 1, 1996, 107-120). L'article de tête de la revue des jésuites s'inspirait de la traduction italienne du livre No other Name? A critical survey of Christian attitudes toward the world religions (1985) de Paul F. Knitter, professeur à la Xavier University of Cincinnati. Sur la base de sa thèse Knitter invitait les chrétiens à abandonner définitivement la présomption de posséder l'unique religion révélée, l'unique Vérité, et à aller à la rencontre des autres de façon à arriver à un accord sur l'unique vérité accessible dans un monde relativiste. Knitter avait collaboré sur la même ligne avec un théologien presbytérien John Hick qui soutenait le caractère mythique de l'incarnation: celle-ci serait une pure métaphore pour exprimer, de façon à être accessible à la raison humaine, l'amour éternel et infini de Dieu qui, étant justement infini, ne peut pas être réduit à un homme, fût-il même Jésus. Nous sommes en présence d'une nouvelle tentative de dialogue interreligieux sur des présupposés relativistes. La pensée de Panikkar appartient elle aussi, en un certain sens, à ce courant: l'homme qui porte le nom de Jésus n'est qu'une des manifestations du Christ qui se serait incarné aussi en Rama, Krishna, Isvara, Purusha o Tathagata... puisque pas une de ces manifestations n'épuise le Mystère. Ratzinger donne une réponse nette à cette position: «Si on observe la situation actuelle [...] le fait que l'on continue malgré tout à croire encore chrétiennement et pas simplement dans les formes de substitution que proposent Hick, Knitter et d'autres encore, mais avec la foi pleine et joyeuse du Nouveau Testament, de l'Eglise de tous les temps, doit même apparaître comme un miracle. Comment se fait-il que la foi ait encore indiscutablement une possibilité de succès? Je dirais que c'est parce qu'elle trouve sa correspondance dans la nature de l'homme. L'homme possède en effet une dimension plus ample que celle que Kant et les différentes philosophies post-kantiennes lui ont attribuée. Kant lui-même a aussi dû l'admettre d'une certaine façon avec ses postulats. Il y a dans l'homme une inextinguible aspiration nostalgique vers l'infini. Pas une des réponses qui ont été cherchées n'est suffisante; Dieu seul qui s'est fait fini pour lacérer notre finitude et la conduire dans l'ampleur de son infinité est en mesure de venir à l'encontre des questions de notre être. C'est pourquoi la foi chrétienne reviendra aujourd'hui aussi trouver l'homme. Notre devoir est celui de le servir avec un humble courage, avec toute la force de notre cœur» (142-143).