Auteur: Laura Paoletti [éd.]
Titre: L'identità in conflitto dell'Europa. Cristianesimo, laicità, laicismo
Editeur: Il Mulino, Bologna 2005 pp. 216

Dernière mise à jour: 22/04/2022 09:51:25

Comment le terme conflit peut-il s'accorder avec les termes identité, Europe, christianisme et laïcité sans s'exposer à des interprétations unidimensionnelles qui le conçoivent comme quelque chose d'antithétique à la construction « harmonique » d'identités nationales et supranationales ? Le volume établi par Laura Paoletti offre une réponse à cette question, en proposant une réflexion sur le terme de conflit qui va au-delà de la limite des interprétations déterministes selon lesquelles ce terme, coïncidant immédiatement avec celui de la guerre, est inévitablement « le contraire de la paix ». Déjà dans la préface, en effet, sont illustrées les lignes maîtresses d'une nouvelle réflexion sur le conflit qui conçoit ce dernier comme un élément intrinsèque aux dynamiques sociales, en mesure d'introduire un changement qui contient une proposition. On peut relever de fortes analogies entre cette conception et celle qui identifie comme possible au niveau transnational un « universalisme des loyautés multiples », sur la base duquel toute culture ne pouvant réaliser une coïncidence totale entre son propre point de vue et celui des autres1, peut toutefois avancer dans une confrontation avec les autres sans renoncer à sa propre identité. Sur la voie d'une identification féconde et non pas destructrice de la reconnaissance de l'existence d'une conflictualité structurelle entre christianisme et laïcité, il est possible de vérifier une hypothèse de travail qui définisse de façon constructive une identité work in progress pour l'Europe. En prenant acte des différences et à la lumière de ces dernières, cette identité peut opérer le dépassement d'une optique purement constitutive entre les différentes cultures, en procédant avec clarté d'horizon et de signification. Comme Paoletti l'affirme avec lucidité, « l'aboutissement d'un tel processus se trouve aux antipodes d'un vague syncrétisme qui confond et rend méconnaissable les éléments culturels qui sont en jeu ; au contraire, autant le christianisme se montre capable d'entrer réellement en conflit avec l'autre de soi, autant sa spécificité émerge et son identité s'enrichit » (p. 10). Sur le versant de la laïcité on comprend clairement combien il est crucial d'aller au-delà d'une interprétation réductrice et stérile de l'identité laïque conçue comme résultat de la neutralisation de l'identité chrétienne. Au contraire, une conception dynamique entend l'identité laïque comme « une sphère commune à toutes les religions en tant que droit naturel de la personne humaine et des gens » (Donati, p. 136). La religion catholique est légitimée à entrer à plein titre dans le débat inhérent à la sphère publique et aux thèmes propres à la politique, face à la conviction que les citoyens « ne sont pas tenus à taire leurs convictions religieuses, ni quand ils votent, ni quand ils décident en ce qui concerne la chose publique ou qu'ils prennent des décisions institutionnelles » (Donati, p. 133). Le nœud que l'après-modernité doit trouver la façon de dénouer se trouve ici, si celle ci ne veut pas rester bloquée dans une impasse qui investit soit les catégories de pensée, soit la pratique : comment qualifier du point de vue religieux l'agir public, de façon à ce que la régénération de la société soit possible ? La soi-disant « religion civile » que les états modernes ont tenté de « construire » comme succédané universaliste et unifiant des religions confessionnelles et qui se base sur une tolérance libérale neutre en mesure de garantir la stabilité aux contextes occidentaux, a amplement démontré ses limites, dans le sens qu'elle a édulcoré les identités en les privant des fondements basés sur des valeurs, sur la base d'une soi-disant égalité qui montre aujourd'hui sa dangereuse fragilité. Le défi que les réflexions contenues dans le volume posent à la pensée occidentale sur le thème de l'identité européenne est celui qui tente de transformer une vision cristallisée du conflit en une vision créative, c'est-à-dire qui n'est pas destinée à perpétuer de façon répétitive un déjà-vu extrêmement stérile pour le destin culturel du Vieux Continent, mais ouverte à la possibilité de se renouveler dans une perspective qui voie l'affirmation des identités religieuses, non pas comme prévarication inappropriée, mais comme ressource fondamentale pour la société et pour un nouveau sens à attribuer à la laïcité. --------------- 1. P. Donati, The challenge of universalism in a multicultural postmodern society: a relational approach, in E. Halas (éd.), Florian Znaniecki's sociological theory and the challenges of 21 century, Peter Lang, Frankfurt am Mainz 2000, pp. 31-47.